Fragments d’un recueil de vrais fragments de faux romans.
« Je ramassais, éparpillés dans le sable, les coquillages, les couteaux, les fleurs en papier, ma pelle et les « formes » en plastique de couleur avec lesquelles j’avais moulé tout un bestiaire de poissons et de tortues. Une toile aux lignes bleue et blanche nous abritait encore, maman et moi, du vent qui s’était levé en fin de journée et nous avait convaincues de rejoindre l’abri de l’appartement après avoir rangé tout notre équipement de plagiste dans la cabine de bain. Lorsqu’enfin tout fut rangé, que mes sandalettes avaient été vidées du sable qui s’y était glissé, que maman m’ait coiffé du petit bonnet de tissu qui me protégeait du soleil, nous rejoignîmes la digue. Je me retournai pour jeter un dernier coup d’œil à la mer et, intriguée par le travail qu’accomplissait les pêcheurs, dont la photographie agrandie ornait l’arrière de notre cabine, je posai à maman cette question que, cinquante ans après, elle aime encore évoquer lorsqu’elle réunit autour de la table de bridge de vieilles amies, sourdes et tricheuses, et qu’elle décrit ma stupéfaction devant cette image en noir et blanc :
« Maman, ils viennent la nuit alors ? »
« Haute mère »
© Jean Jauniaux
« Cabine : nom que les marins donnent à une petite chambre pratiquée dans un navire, et qui n’est ordinairement occupée que par le commandant. Il n’y a de cabine que sur les petits bâtiments »
« Dictionnaire de la conversation à l’usage des dames et des jeunes personnes » publié sous la direction de M.W. Duckett avec le concours des principaux collaborateurs à ce grand ouvrage (Paris, 1841, Tome dixième)
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