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Photo du rédacteurAnna Alexis Michel

Comment écrire un livre en un été ? (Première semaine)

Après quelques mois d'absence, l'auteure Belge de Miami, Anna Alexis Michel nous revient sur le blog chaque vendredi avec un billet passionnant à dévorer ! Un petit plaisir de fin de semaine à partager.

Le titre est accrocheur, non ? Il sonne comme un de ces slogans improbables. Pourtant, chaque année, des auteurs prolifiques et célébrés réussissent ce qui peut pour certains paraître un exploit, mais relève pour eux d'une routine bien rodée.


D'abord, bien sûr, mon titre est sinon mensonger, du moins quelque peu réducteur : quand on parle d'écrire en un mois ou, pour être raisonnable, en une saison, il ne s'agit pas d'aller de l'idée à la publication, sauf à écrire un torchon. Ce court laps de temps est celui de la phase d'écriture elle-même. L'idée, bien sûr, vous l'avez déjà !

L'année durant, l'histoire qui a germé dans votre tête, vous l'avez sentie grandir en vous. Elle vous a pris le cœur, puis est descendue jusqu'à vos tripes. Là, voilà plusieurs semaines qu'elle vous donne des coups de pied, impatiente qu'elle est de naître. Déjà, cette histoire naissante, vous l'avez nommée. Même si le nom changera peut-être à la naissance, si sa petite frimousse l'exige. Ou si, sur les fonts baptismaux de l'édition, un parrain pénible mais parfois nécessaire se mêle de lui donner un titre. Mais vous déjà, vous l'avez nommée. C'est indispensable, car ce nom est à lui seul le résumé de l'œuvre, celui qui à la fois dessinera ses traits et décidera de son caractère.


Ensuite, vous avez déjà fait des recherches, dans le tréfonds des bibliothèques ou la profondeur des âmes. Pendant des mois, vos yeux, vos oreilles, vos mains ont traîné sur les choses du quotidien, en pensant à l'histoire que vous connaissez déjà et qui vous suppliait de la nourrir. Tous vos sens ont aspiré les senteurs, les saveurs, les odeurs, mais aussi la rugosité et la laideur du monde. Tout ce que vous allez injecter maintenant à vos personnages, - le sang qui coulera dans leurs veines, la sueur qui perlera sur leur front, la douceur de leurs caresses, la douleur de leurs plaies ouvertes-, c'est du monde que tout cela viendra. Vous n'êtes qu'un passeur, un trafiquant d'émotions.


Enfin, vous avez une trame puisque vous savez qu'il en faut une pour écrire une légende. Et un squelette, sous peine d'accoucher d'une bouillie infâme et informe incapable de se frayer un chemin dans le monde. C'est pourquoi, avant de l'écrire, votre histoire a un début et une fin. Vous savez comment elle commence et où, et pourquoi, elle finit. Vous en connaissez les principaux rebondissements, les complications progressives et vous savez ce que vous voulez raconter. Bien sûr, il reste une immensité d'improvisation acceptable : celle des anecdotes qui vous permettront d'éclairer vos protagonistes, des scènes d'arrière-plan qui les mettront en valeur, des personnages secondaires et des figurants qui les serviront ou les desserviront à dessein. Mais le fil d'Ariane est là, ne le lâchez pas dans le labyrinthe de la création et vous pourrez tuer le monstre et trouver votre chemin.


Et maintenant, qu'il me soit permis de vous quitter jusqu'à la semaine prochaine.

Non, je ne vous abandonne pas. Mais oui, je vous laisse : il se trouve - figurez-vous- que j'ai un roman à écrire.


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