Digitalisation, hybridation, agilité, confiance, bien avant la crise du Covid-19 les entreprises se posaient toutes sortes de questions sur leur organisation. La pandémie mondiale n’aura fait qu’accélérer un mouvement qui semblait déjà profond vers des organisations de plus en plus souples, décentralisées, distancielles, dans lesquelles chaque individu est amené à prendre ses responsabilités. Des nouvelles organisations qui répondent aux attentes de générations de diplômés qui sont les mieux formés de l’histoire mais n’en sont pas moins parfois anxieux face à ces mutations.
Au regard de toutes ces réflexions, la question majeure que se posent les décideurs est la suivante : « Quels métiers pour demain ? »
Organisations internationales, think tank, fondations, organismes gouvernementaux… jamais l’évolution des métiers n’aura été autant scrutée. Le signe que les évolutions en cours aujourd’hui du fait de la révolution technologique n’en sont sans doute qu’à leurs débuts.
85 % des métiers exercés en 2030 n’existent pas encore. C’est ce qu’assurait déjà en 2017 le rapport « The next era of human-machine partnerships » publié conjointement par Dell Technologies et l’Institute for the future (IFTF). Un an plus tard, le World Economic Forum venait conforter cette prévision dans son rapport « The digital enterprise, moving from experimentation to transformation », estimant à 65 %, le pourcentage des enfants d’aujourd’hui appelés à exercer des types d’emplois n’existant pas encore. Une révolution due évidemment à l’accélération technologique dans les domaines du digital, de l’intelligence artificielle et des datas. La conséquence? Bon nombre de tâches aujourd’hui effectuées par des travailleurs seront demain automatisées. À quel degré? En 2019, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estimait dans son rapport sur les perspectives de l’emploi qu’au cours des 15 ou 20 prochaines années, 46 % des emplois actuels seraient transformés par le développement de l’automatisation et que, parmi ceux-ci, 14 % étaient susceptibles de disparaître complètement.
Intelligence artificielle : un portefeuille de compétences plutôt qu’un métier
Si certains métiers totalement nouveaux vont faire leur apparition, bon nombre de fonctions qualifiées vont perdurer. Mais elles vont évoluer et voir leur périmètre redéfini. Dans son livre blanc « Bâtir le futur des métiers » paru en juin 2020, l’Observatoire des métiers du futur se penche notamment sur celles des managers, dont les contours vont être entièrement redessinés dans les années à venir. Au cœur de nouveaux modes d’organisation basées sur des relations plus équilibrées, autonomisantes et inclusives, ils piloteront leur activité en privilégiant le mode projet, le travail en réseau et la création de groupes ponctuels autour de compétences complémentaires et multidisciplinaires afin de répondre aux besoins du moment. « Ils seront avant tout des coachs en employabilité, accompagnant l’évolution des parcours de leurs collaborateurs », assure Isabelle Rouhan. Une tâche d’autant plus complexe que la notion de métier elle-même, dans un contexte marqué par des changements perpétuels, se fait de plus en plus floue. Certains préfèrent évoquer le concept de « portefeuille de compétences », moins figé, remarque encore la présidente de l’Observatoire des métiers du futur. Et la crise du Covid-19 a accéléré le mouvement de transformation. Des compétences d’ailleurs amenées à métiers du futur, un think tank créé pour contribuer à développer l’employabilité en France en décryptant les tendances de l’évolution des métiers. Elle propose ainsi des fiches métiers présentant le neuro-manager, l’architecte de smart city, l’amplificateur de talents, l’avocat augmenté et même… l’éducateur de robots. Rassemblant des organisations professionnelles comme l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) et le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS), des organisations technologiques telles que l’Association française de mécanique (AFM) et des acteurs de l’enseignement supérieur dont Arts & Métiers Paris Tech, l’Institut Mines-Télécom et Centrale Supélec, l’Alliance Industrie du Futur scrute de son côté la métamorphose industrielle opérée par le numérique et les nouvelles technologies et les profondes mutations des compétences et qualifications qu’elle entraîne. Elle relève par exemple le rôle essentiel du Big Data dans la transformation digitale des entreprises industrielles, qui permet l’accès aux données en temps réel, l’optimisation de systèmes complexes, par exemple dans les secteurs de l’énergie et des transports, ou encore la maintenance connectée. À la clé, de nombreuses opportunités de postes pour des datas scientists, des datas miners ou encore des datas analysts.
D’ici 2030, 60% des emplois verront au moins 30% de leurs tâches automatisées.
L’intelligence artificielle (IA) constitue une nouvelle frontière technologique, source de nombreuses retombées positives pour l’activité économique. Mais aussi pour l’environnement de travail grâce à l’automatisation d’un certain nombre de tâches simples.
Cependant, l’IA a largement progressé entre autres dans le domaine de la reconnaissance d’image, puisqu’elle réplique des fonctions simples du cerveau humain avec une meilleure acuité. A titre illustratif, en 2013-2014, elle était capable de reconnaître une image de chat dans 85 % des cas, contre 95 % pour un être humain. A l’heure actuelle, son taux de fiabilité atteint 98 %. Pour certaines tâches, l’IA est plus efficace que nous, entraînant par conséquent une reconfiguration du travail et des métiers. L’université d’Oxford évoque une disparition de 40 % des emplois. Nous ne sommes pas en ligne avec cette prospective. McKinsey a examiné l’impact potentiel de l’automatisation et des technologies sur 800 métiers, scindés en 2000 tâches. Nous arrivons à la conclusion qu’en 2030, ce sont 60 % des emplois à l’échelle mondiale qui verront au moins 30 % de leurs tâches automatisées. Les professions pour lesquelles 90 % des activités seront automatisées représentent moins de 10 % du total au sein des économies matures.
Concrètement, ce sont plutôt les contenus des emplois existants qui vont évoluer massivement. À titre d’exemple, on a longtemps pensé que les assistants juridiques allaient disparaître. Au contraire, leur profession est en pleine croissance aux États-Unis aujourd’hui : l’intelligence artificielle leur permet de travailler plus rapidement et plus efficacement. Les individus dotés des compétences nécessaires à l’exploitation de l’IA seront plus recherchés sur le marché du travail.
Les entreprises attendent quoi aux jeunes diplômés?
Soft skills, hybridation des compétences, humanités, pluridisciplinarité… quels que soient les termes employés, les écoles et les entreprises témoignent toutes de la nécessité de former et de recruter des personnes aux profils agiles, en capacité de s’adapter aux autres et à un monde en mutation rapide. Un constat qui, par effet boomerang, réinterroge à la fois les méthodes pédagogiques, les critères de recrutement et les modes de management.
Il est temps de voir grand…le monde évolue !
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