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Photo du rédacteurMarie-Claire Dehaene

Le paradis des chats

L'esprit de mes chats envoute, ensorcelle, habite ma maison et décide du sort de celui qui entre et de celui qui sort. Je les aime, ils sont si gentils et si égoïstes, il ne leur manque que la parole.

Place aux chats sous toutes leurs facettes dans notre humanité partagée, ces petits êtres si mystérieux, ceux que nous avons aimés et qui reposent en paix, ceux qui vivent encore à nos côtés. Ils sont si nombreux, je ne pensais jamais posséder autant de chats dans ma vie, quarante chats, tous différents, de toutes couleurs, de toutes races, du plus grand au plus petit, du plus menu au plus costaud, du chat de gouttière en passant par le Bengal, le Chartreux, le Siamois, le chat Européen, le Persan... Mes chats connaissent tous leurs prénoms et quelques-uns même leur surnom.

Où êtes-vous les enfants ? N’ayant jamais été mère, je dis les enfants, car je les considère un peu comme des enfants. Je les appelle souvent entre dix-huit heures et vingt heures, cela me laisse le temps de leur préparer leur repas. Pour leur literie, je suis très ordonnée, chaque chat possède son panier garni d’un tapis en éponge fraîchement lavé toutes les semaines et ils le savent très bien. Les chats adorent l’odeur du propre, surtout quand je nettoie les sols à l’eau de javel, ils ronronnent et se roulent sur le carrelage comme des anguilles.

Dans le passé, les chats n’ont pas toujours été présents dans mon existence. Lors de mon adolescence, chez mes grands-parents maternels, j’eus la chance de les connaître. Je les adorais tous sans exception, pour leur nature indépendante empreinte d’une inébranlable dignité. Chacun de ces chats avait été un ami unique et un compagnon de jeu.

Impénétrables et mystérieux en dépit de leur perpétuelle présence au sein de la maisonnée. Je ressentais pour eux une immense tendresse. Ces petits félins me fascinaient.


Depuis toujours les chats sont pour moi bien plus que des animaux domestiques. Ils entendent « l’appel de la forêt » au point d’abandonner de temps à autre le confort de la maison pour aller rôder, chasser et prendre des risques, de préférence dans les bois et les prés, mais aussi dans les rues, les parcs et les jardins. C’est surtout quand il fait chaud ou à la période des amours, que l’on retrouve des petits corps mutilés sur la route ou au bord d’un fossé, il y en a d’autres qui disparaissent et on ne peut faire leur deuil, ce qui est très éprouvant. Les chats sont à la fois domestiques et sauvages, dociles et mystérieux. Ils marchent à pas de loup, s’accouplent bruyamment et nous débarrassent des nuisibles. Leurs yeux de verre brillent dans le noir et comme la lune, leur pupille passe de la forme ronde à celle du croissant. Animaux sacrés pour la déesse égyptienne de la lune Isis, ils connaissent l’âme féminine.

Par les jours de printemps précoce, aux heures où la terre dégelée, fume sous le soleil et embaume, certains massifs, certaines plates-bandes semblent jonchées de couleuvres : les princes et princesses rayés, tachetés ou de couleur unie, tordent leurs reins, rampent sur leur ventre, fouettent de la queue et râpent délicatement au sol leur museau pour l’imprégner de l’odeur prometteuse de la belle saison. Ils savent rester là de longues heures au soleil dans le jardin, levant de temps en temps les yeux vers le ciel. Ils n’ont pas l’air effarés. Ils connaissent mon visage, ils ne mendient pas et je ne peux lire dans leur regard que l’ennui d’avoir faim, d’avoir froid ou d’être mouillés.

Il y a des chats heureux et des chats malheureux, des chats obligés à la dissimulation, des chats méconnus, des chats qu’une inguérissable erreur humaine distribue à des mains indignes, des chats qui imaginent leur vie durant, une récompense qui ne viendra jamais. Des chats qui attendent la compréhension et la pitié de l’homme. Mais tant de misère et de malchance ne suffisent pas à former un chat. Il est important de les caresser, d’être vigilant, d’avoir des moments de jeux et de complicité et surtout de leur laisser leur liberté.

Chaque matin quand j’ouvre la porte, les chats courent hors de la maison, bâillent, s'étirent sur l’herbe grasse couverte de rosée, jouent avec les papillons, les insectes, les oiseaux, leur terrain de jeu est sacré.

Ils se lovent dans le jardin, grimpent aux arbres, flairent la trace des intrus et disparaissent dans la nature. Il peut se passer plusieurs heures avant que je ne les revoie.

L’expérience des chats est une vraie collection de soucis quotidiens, d’angoisses, mais paradoxalement c’est aussi un réel plaisir. On peut leur parler, ils ne vous contrarieront jamais. On peut leur confier nos secrets et tous nos soucis. Alors les bêtises, le pipi, les griffes et tout le reste, c’est vite oublié.

Pour éduquer mes chats, j’ai appris au fil du temps qu’il n’existe aucune méthode. Ce n’est qu’avec de la patience et beaucoup d’amour qu’on arrive à les canaliser, à les dresser. Ils sont ma famille, je les aime, ils le savent et ils me le rendent bien. Ils m’apportent une source de réconfort et apaisent mes souffrances.


« Le chat est d’une honnêteté absolue : les êtres humains cachent, pour une raison ou une autre, leurs sentiments, les chats, non ». Ernest Hemingway

Il a deux moyens d’oublier les tracas de la vie, la musique et les chats. Albert Schweitzer


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